Thérèse, une femme d'aujourd'hui

Une femme comme vous et moi. Une femme pleine de bon sens, réaliste, sachant ce qu'un corps fatigué, malade, usé, est capable ou incapable de faire. Sa fréquentation nous renvoie à une réalité concrète et incarnée dans le quotidien et le devoir d'état. Mais aussi dans la réalité d'une certitude : le Seigneur appelle et si vous répondez : " Parle, Seigneur, ton serviteur, ta servante, écoute " (1^er livre de Samuel 3,10), vous pouvez compter qu'il vous donnera tous les moyens et les charismes indispensables pour réaliser son appel. Ne comptez pas sur vos forces mais seulement sur le Seigneur.

Bonne ménagère, Thérèse se préoccupe des menus. Dans ses lettres, ou dans ses constitutions, elle insiste sur l'urgence de bien nourrir les religieux et religieuses.

Elle pourrait, aujourd'hui, exposer ses gadgets au salon des inventions :

        - La région est remplie d'amandiers. Diététicienne avant l'heure, elle a vite compris que les amandes sont nécessaires à des régimes dont la viande est exclue. Elle installe donc un moulin à moudre les amandes dans le couvent de Malagòn.

        - A Malagòn encore, on voit, dans une cave, des jattes de terre reliées par un système de tuyauteries. Cela pour garder l'eau fraîche : réfrigérateur du XVI° siècle.

Elle examine, soupèse, calcule, opte délibérément pour ce qu'il y a de plus utile, pour l'essentiel. Tout doit concourir au résultat souhaité ! La métamorphose en Dieu de l'infime vermisseau qui file patiemment le cocon de l'oraison dans lequel il renaîtra papillon.

Elle décide, par exemple, que les carmélites auront les cheveux coupés. Nullement par pénitence. Elle précise : " Pour ne pas perdre de temps à les coiffer. "

Tout ce qui contribue à perdre du temps, elle invite fermement à s'en débarrasser, comme les visiteurs futiles, s'ils ne tirent aucun bénéfice de leurs visites mais apportent les futilités du monde.

Elle est ferme et directe : " Ces peurs que vous éprouvez ? Vous ne faites que perdre du temps ! " écrit-elle à un éminent dominicain.

Le temps a sur nous une telle emprise ! Si souvent nous répondons: " Je n'ai pas le temps…de prier, de faire ceci ou cela, de t'écouter…! "

Thérèse met Dieu avant tout, alors que nous Le faisons passer après nos obligations temporelles. Nous nous croyons réalistes alors que nous sommes stupides et mettons la charrue avant les bœufs.

Thérèse se refuse à tout ce qui est négatif : elle proclame que le chemin qui mène à Dieu est une route large et royale, sansq nier, toutefois, la Parole de l'Évangile qui nous dit qu'il est étroit le chemin qui mène vers Dieu.

Étroit dans le sens que l'on ne peut pas faire n'importe quoi et qu'il nous faut coopérer à la volonté de Dieu. Étroit parce que c'est Dieu qui nous y mène, mais large et royal parce qu'il est l'infini Majesté d'Amour.

Elle affirme que le Christ est ressuscité et un Dieu vivant. Elle secoue gentiment son frère Lorenzo qui médite sur l'enfer et l'invite plutôt à contempler les joies du paradis.

 A Avila, au début de ses manifestations surnaturelles, les dévots de la ville la croyaient la proie du démon. Elle souffrit jusqu'au jour où sa superbe nature la délivra d'un seul trait : " Je ne comprends pas ces peurs ; pourquoi dire démon, démon alors que nous pouvons dire Dieu, Dieu, et les faire trembler ? Je crains désormais davantage ceux qui ont peur du démon que le démon lui-même."

 Elle affirme qu'on ne peut servir Dieu dans l'inquiétude, qu'une âme angoissée ne peut servir bien le Seigneur : " C'est une grande chose que d'être contente. " Et cette phrase célèbre : " Je crains une nonne mécontente plus que beaucoup de démons. " C'est pourquoi elle ne perd pas une occasion de rire ou de faire rire. Il n'est sainte qui n'aie l'esprit plus vif. Elle a toujours un mot plaisant au bout de la plume ou sur les lèvres et se moque souvent d'elle-même.